A mon chair é clair de chaux(colat) é tendre,
Le langage est un voile qui se dépose délicatement sur le chef de votre crâne et, vous prend inexorablement aux cheveux. C’est un supplice à froid qui monte à la brûlure intense par des moyens dé-tournés mais qui vont jusqu’à la relapse, ce détourage. Il se fait vôtre par immersion dans le cuir (chevelu), à même le suif et descend dans le sang par quoi il se propage aux viscères et aux membres, il atteindra enfin les ongles puis donnera les angles : à polir par la rhétorique, c’est là le rire du langage, son dernier pas avant la chute hors du corps pour retomber à la poussière. Il a accompli une vie humaine, draguant la lie des fonds de courants d’abord : par où il s’inscrivit, puis s’en dégageant avec aménité peu à peu, à chaque tour de roue par lequel il s’élève, il prend plaisir à gagner du galon : de degré en degré il peut devenir parfois élégiaque. Ou épique, alexandrin ou dodécaphonique etc… Quand il aura parcouru chaque station du corps d’un être, remonté du profond vers la périphérie parce que la peau pèle, mais oui, simplement, alors il s’élimine, l’être tombe, son verbe l’a quitté, il a bouclé le cercle, l’être en est mort. Sur le sol, un amas qui peut fertiliser une récolte qui ira en nourrir un autre. Le langage est une matière qui ne s'ignore pas toujours. Il ne se distingue pas d’un tissu que l’on ne peut visuellement pas distinguer, il n’a pas de touché possible, il n’a pour lui que la prise en force qu’il accomplit sur l’être depuis son toujours. Sur l’âtre, cette cervelle qui brûle par combustion d’un corps qui, en cela, se renouvelle. Ça chauffe. C’est au principe du vivant la supposée chaleur, l’énergie qui se manifeste. Ça se répand partout le langage, ça fuse, ça pète, ça rouspète et ça chante. Mais n’oubliez jamais de lui rendre grâce : pissez partout où ça passe, cela porte pour nom " marquer son territoire ".
De mon temps de collégienne, les gamines usaient d’un terme que je récusais pour crânement désigner leur petit-ami en voulant marquer une maturité, alors qu’elles ne témoignaient que d’une grégarité, parce qu’au demeurant c’était un mot qui dénotait une servitude à un degré supérieur à ce que la fièvre moutonnière laissait déjà penser. Elles disaient " mon mec ". Pas une ne faisait exception au sein de celles qui arboraient un petit-ami. Cette uniformité d’appellation me déplaisait d’autant plus qu’au pays où une femme pouvait vraiment se revendiquer liée à un tel terme, alors comme maintenant, une femme appartenait ; elle n’aurait pu s’y prétendre l’amie d’un mec, la Mecque veillait. Pour être juste, j’avouerai jusqu’au bout. Le seul petit-ami de mes années scolaires fut celui de la maternelle, il portait un nom étranger incorporant le doux nom d’ " Allah ". Je ne mens pas. Allah était libéral. Il était fils d’immigrés. J’en garde un gracieux souvenir. Je lui donnai un jour une bague. Puis j’oubliai. Des années plus tard, et il est vrai que nous effectuions des scolarités parallèles, proches, il trouva l’occasion de me le rappeler. Je fus étonnée. Je ne manquai toutefois pas de lui faire remarquer que si je lui avais bien fait un don – celui d’une bague – c’était pourtant lui qui en avait gardé le souvenir. Mais, passons, ce qui tombe là n’est qu’une anecdote sur la soupe du jour.
Il faut savoir parfois passer outre les mots, ce qui, je le concède, n’est guère aisé lorsque l’on n’en a pas l’instinct, et en venir de façon directe, radicale, aux actes et aux êtres. Pour " se rendre compte par soi-même ", ce que je fis avec " Allah ". Les gamines s’en tenaient à un mot qu’elles jugeaient séduisant mais qui à moi, parce que déjà j’avais l’oreille de ma maladie, ne me sembla que trop franc – du collier. Du joug. Ce qui restait de servitude (beaucoup), se montrait là. Et se montre encore. " C’est l’histoire d’un mec " dit la vulgate.
" Mon mec " est une expression, elle appartient pour ainsi dire, presque uniquement à un langage idiomatique, elle témoigne, c’est à dire que dans sa profondeur elle fait aussi montre de toute sa superficialité. Elle témoigne d’une croûte. De l’apparence que l’on voudrait nous faire prendre pour le moine. Toutes les réflexions qui précèdent et celles qui suivront, n’entament en rien la religion musulmane dans sa vérité. Je m’en prends à l’usage bête que nous en faisons. S’appuyer à une "Isle", au sens où l’entendirent Kant ou Hegel n’aurait rien que de très noble et de très haut pour le genre humain. Je veux penser que le sens qu’ils donnèrent à leur ambition a quelque chose à voir avec l’Islam dans l’idée même de ce qu'ils essayèrent d'espérer pour l’humanité, ne serait-ce, justement, que pour la " hauteur de vue ". Être une " ile " pour une femme, c’est enfin laisser tomber le superflux de " femelle " où toujours l’on a voulu les confiner, cela consiste " seulement " à ajouter la marque effective – inaliénable – de la Disparition (e) au général, à la généralité, une généralité hégémonique, certes. Mais il faut savoir ce que l’on veut et de surcroît savoir que ce ne sera qu’une étape. (Dont, d’ailleurs, rien ne permet d’anticiper si cette " étape " ( ?) aura quelque existence effective). Mais une étape qui pourrait bien plomber la généralité dans son hégémonie comme telle. Nécessité oblige ? Parce que les moyens ne valent pas la Fin. Et je serai cette isle ; cette plage d’un temps d’hypothèse : l’hypothèse d’une hypothèque – sur la féminité telle que nous nous la représentons.
Jouons – veux-tu ?
- 3 pour 1 - a été écrit au mois de décembre 2010.
Epilogue provisoire :
Au jeu de piste des blasons du Corps, je demande la bague : l'anneau/la pierre, le trou/le point, le point ? la dent, la petite dent pyramidale, la petite étoile lovée dans les plis de soie de la voûte céleste et que l'on peut observer depuis les hauteurs du Venusberg.
Les Pierres du Mur des Lamentations.
"Tu es Pierre et sur cette Pierre je bâtirai mon Eglise".
La Kaaba dite Pierre Noire.