mardi 16 mars 2010

Loto-Fiction VIII


Lorsque je tape, lorsque je cogne sur mon piano, pour un quelque concert, je mets en branle, j’articule une remontée des profondeurs dont la nature de nappe, de vague, de noyade m’exhausse comme elle m’enfonce. Je tourne au centre d’un trou qui culmine. Je vagis, je parle, je bégaie et je rampe avec la grâce d’un mouvement de valse qui pivote autour de ses obsessions. Les mains déployées en oiseaux de plomb aimantés aux touches, je développe la jouissance de reproduire sans fin la liberté, sa sensation, mieux qu’une libération, la déglutition de la liberté, son avalanche, son avalement, son dévalement, sa vallée des joies, sa persistance scintillante. Le beuglement d’un rire perlé, et triomphant dans la soie et le velours. Des accents de larmes qui mouillent l’âme tranchante, cruelle qui toujours nie et refuse et ce faisant retombe, dans un mouvement ralenti et amorti, gracieux, sur un monceau de plumes où elle s’abandonne, offerte, balbutiante et déterminée. Minée. Et seule.

Tu ne ressens pas le besoin d’être seul pour composer l’échantillon qui offrira son refrain au motif, je peux rôder autour de toi. Comme une louve ou un félin femelle qui hume le mâle à la fourrure, je plonge le museau dans le col de ton tricot et tu te retournes, vif, et mords et saisis entre tes dents la note de moi que tu cacheras et qui articulera ta création. Moi, je suis le chiffre de tes œuvres et toi, tu es la lettre sans relâche dérobée de mon code secret. Et tu chois en permanence, et je n’ai que mes deux mains pour relever un monde aussi lourd par la pierre qui le leste que m’est lourde ton absence dans ta plus banale présence. Je pense à toi. Mais tu me prives de ton absence. Et je te touche, malgré toi.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire