lundi 22 mars 2010

Loto-Fiction XIV


Papa et Maman ont, gentillement, dressé un cierge de part et d’autre de ton catafalque. Je te veillerai la nuit entière. Je la passerai à me remémorer brièvement la nuit de notre mort. Tu y attrapas le goût du mimosa, fleur poudreuse par laquelle tu composas toujours tes échantillons les plus lumineux. J’en avais gardé une poignée du duvet dans les cheveux où tu enfonçais le nez pour prendre une profonde inspiration.
Voisins autant que deux doigts d’une main, l’on ne pouvait nous séparer sans risquer de fendre la main en deux et comme, par hasard, ne se trouva point de lit encore disponible au dortoir des filles, on m’attribua une couche dans le dortoir des tiens. La tentation n’avait pas à en être une, mais simplement une occasion, une chance, le positif du hasard quand on le mène par le bout du nez. C’est, ce que nous faisions, enfants, d’instinct. Et tu vins. Visant à la coupe par sa fente. Et moi, alors, pure me retournais, voulant voir au visage, à ton visage. Quand tu te contentais de la pomme chevelue d’une douche brûlante et humaine, qui arrosait de tourment tes sentiments. Je me retournais. Je me retournai. Et cerise, elle mordit au gâteau, rouge. La petite mord. De cette tonsure tu ne te remis point.
Une nuit, seule, nous partageâmes le même lit pour l’éternité, l’éternité d’un échec. Une sombre nuit d’enfance d’où nous tirons la lueur qui nous mène encore. Frère et sœur en convalescence à la montagne, nous survécûmes à une blessure qui nous liait indéfectiblement. Tu as décidé de ne plus jamais en rompre des liens engagés dans le sang. Moi, j’ai fauté, je le sais, from now on. Et ne me renie point. J’entrerai, au lendemain des funérailles, en clinique, en vue de l’ablation de l’utérus. Quand ça ne sert point, ça prolifère par le défaut de soi, cette engeance. Je resterai cachée quelques instants, on ignorera tout de l’amputation de l’indicible.

J’ai bâclé ces deux derniers paragraphes de notre relation : il fallait en finir.

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